La Croatie à vélos en suivant (presque) les traces de l’Eurovélo 8 et en passant par les îles de Cres, Krk, Rab et Pag.
J+ 63, 2404 km | 23 avril-12 mai.
Après un court passage en Slovénie, nous voilà parties à la rencontre de la Croatie et de ses îles. La Croatie, ça monte et ça descend. À tel point qu’on commence à observer -avec curiosité- des muscles se dessiner sur nos cuisses et mollets (et ils seront surement très utiles pour la suite du voyage !) On a décidé de passer par les îles et on peut dire qu’on ne regrette pas notre choix, les paysages étaient oufs ! (Et en bonus, la circulation était relativement clémente).
On vous laisse découvrir quelques anecdotes du voyage et RDV sur le site pour voir plus de photos de la Croatie !
La frontière. Après notre pause obligatoire chez Toni et son Raki, nous revoilà en pleine forme, bien décidées à passer cette frontière qui nous fait de l’oeil, en direction de l’Istrie. En route! La frontière est à seulement quelques centaines de mètres: facile. Facile juste avant le passage d’un mini « col » à environ 130 mètres. On pensait être en forme, mais finalement on a vite compris qu’on était encore dans le mal. ça a probablement été l’une des montées les plus difficiles. On a hissé nos corps lourds et nos véhicules chargés péniblement jusqu’en haut avant de s’échouer à nouveau après cette ascension de 13 km. 😵💫
Île de Cres. On débarque dans le petit village de Porozina. Au loin, sur le bateau on a pu constater à quel point cette île est vallonnée et rocheuse. On va enfin rejoindre Tom et Boss qui voyagent à bord du Steeve Express (un splendide château motorisé) ! Ça nous fait si chaud au coeur de retrouver les copains -rencontrés, en plus, à Dharamshala ! On pourrait rester des années dans ce petit coin de nature préservée, même sans eau potable. C’est donc seulement après s’être donné rendez-vous à la India d’ici la fin de l’année que l’heure est venue de se remettre en route. On est gonflées à bloc pour attaquer les dénivelés de l’île ! À un détail près : on n’a pas anticipé l’absence de civilisation sur les 26 prochains km de grimpette. Et bien entendu, c’est vers 12h que l’on « décolle », en plein pic de chaleur et les gourdes presque vides : un bon moment; on a fait l’un de nos meilleurs pique-nique sur le parking du premier ravitaillement/supermarché de Crès !
Le ventre enfin rempli, on quitte le supermarché en direction de Cres. D’un coup sec, le vélo de GG freine. Panique ! La roue arrière est complètement bloquée. GG se demande vraiment se qu’il se passe avant de comprendre que c’est la polaire d’Anai qui s’est coincée dans la roue et les patins de freins. L’art de se créer des pannes.
Île de Rab. On arrive sur Rab au coucher du soleil. On pédale sous la lumière de fin de journée magnifique avec des montages sans poil qui nous font penser au Ladakh !
En basse saison, le seul bateau pour rejoindre les terres via l’île de Rab est prévu le mercredi à 12h. Parfait ! On arrive le matin assez tôt, pour prendre le temps de remplir les sacoches et les gourdes pour le midi (on ne se fera pas avoir 2 fois !). À l’embarcadère, on reconnait les vélos d’un couple d’allemands rencontré il y a quelques jours (au fameux supermarché). Il y a aussi Tim et Alain, deux anglo et deux couples de hollandais. Dans l’attente du départ, on partage un moment convivial d’échanges de nos voyages respectifs. Dans le fond on sent quand même une légère tension : personne n’a envie de rester sur le quai et le bateau est vraiment petit. Sur le papier, seulement 6 vélos sont autorisés à bord, et on est déjà 8 vélos et 13 personnes ! Tout le monde zieute un peu du coin de l’oeil l’arrivée du capitaine pour prendre son ticket (le prochain bateau est dans 3 jours). Au final, le capitaine débarque serein et souriant : il se fiche bien de toutes ces considérations, et se met à empiler soigneusement tous les vélos (et la trentaine de sacoches). Clairement, on aurait même pu être plus nombreux ! La simplicité fait chaud au coeur !
Zadar. Ce soir, on est hébergées par Lana à Zadar. Elle vit seule avec ses deux jeunes enfants Arian et Alissa, son mari est prisonnier politique. On passe une soirée au rythme des enfants sous le signe de la légèreté. Anai passe un long moment à jouer avec Arian dans le carton d’un frigo: les possibilités sont infinies ! Avant de partir se coucher, Arian nous propose généreusement de passer la nuit dans sa kuća (à prononcer « koutcha » – maison) en carton. On profite de ce passage en ville pour consulter un dentiste pour GG et son abcès qui traine depuis plusieurs jours. Les croates sont d’une efficacité redoutable : on trouve un RDV facilement la veille pour le lendemain, un samedi matin ! C’est l’occasion de tester les services de notre assurance de voyage #chapka ! (On découvre alors dans cette clinique tout un tourisme chirurgical, esthétique et dentaire fort convoité où les gens semblent arriver d’Italie, avec leurs valises, pour un détartrage !)
Trogir. Après une généreuse nuit au milieu des oliviers, on se retient difficilement d’appeler le Guinness World Record lorsqu’on arrive en fin de journée sur l’île qui fait face à Trogir: 89 km au compteur ! Peut être qu’on a hâte de quitter la côte touristique? On a peut être aussi ressenti un coup de pression imaginaire à l’ego quand d’autres personnes nous ont parlé de leur moyenne kilométrique ! On a tellement bien roulé aujourd’hui que GG a même eu le temps de perdre sa dent et de trouver un dentiste pour la replacer ! Décidément, les dentistes en Croatie, on vous aime !
Les villages de côte. On a traversé de nombreux villages balnéaires aux aménagements touristiques plutôt récents. On ne sait pas trop si ce sont les ravages du covid ou simplement si la saison n’a pas encore commencé, mais de nombreux établissements sont désertés. D’autres sont en construction, pour accueillir encore plus de monde (mais quand ?). On a eu le sentiment de parcourir des villes fantômes sans vraiment ressentir l’âme du pays. On croise tout de même quelques touristes, principalement allemands. Les locaux ont d’ailleurs plutôt tendance à nous répondre des « Guten Tag » quand on lance avec assurance des « Dober dan ». C’est assez déstabilisant. Dommage que GG ne se souvienne d’aucun élément de ses 10 années de cours d’Allemand, et qu’Anai ne connaisse que des insultes !
Omis. On a fait la découverte de Omis, en Dalmatie. Ancien bastion de pirates, elle est entourée par la mer d’un côté, les falaises et la rivière Cetina de l’autre: le cadre est juste magnifique !
On décide ensuite d’emprunter l’Eurovelo 8 malgré les « forts » dénivelés annoncés, pour s’échapper de la côte. D’un coup de pédale décidé, Anai s’échappe à la conquête de la montée ! GG suit tranquillement derrière. Après plusieurs kilomètres et l’écart se creusant, Anai ne voit plus GG dans son rétro. C’est là qu’elle décide de faire une surprise à GG en achetant une boisson fraiche dans une épicerie sur la route. GG est censé passer devant. Pas de bol, elle regarde loin vers l’horizon et n’a pas vu le vélo à l’arrêt. Anai ressort victorieuse de sa chasse et retourne au croisement précédant en espérant y croiser GG. Au bout d’un certain temps, elle commence à s’interroger : GG est-elle encore derrière, devant à droite, à gauche ? Sur quelle route ? Anai essaye d’appeler GG (qui a le GPS). Pas de réseau. Après plusieurs tentatives, le farceur de bigophone finit par capter un signal. GG partage sa position, mais le signal faible ne permet pas de avoir si savoir si c’est la route de droite ou celle « un peu plus » à droite. Quoi qu’il en soit, les deux côtes sont raides et on n’a pas envie de se planter ! On s’appelle pour tenter de se donner des indications géographiques. « Allo allo. Megan break grise avec un fanion Hajduk. Tu la vois ? » « Bingo, c’est par là ! » Les boissons ne sont plus si fraiches, mais on est contentes de se retrouver au milieu de cette forêt ! (Même si GG ne s’est doutée de rien de cette affaire !)
Split. Aujourd’hui, on pédale sur la charmante nationale 8 qui longe la mer : une route avec beaucoup de circulation et où la conduite croate n’est pas de tout repos -et c’est peu dire ! A l’horizon, la ville de Split se dessine: une ligne d’industries et de barres d’immeubles. On prend le soin d’éviter la ville et on coupe à travers pour s’échapper de ce bourbier. On finit par se retrouver (inopinément) sur le site archéologique de l’ancienne ville romaine de Salone (sur joli fond de zone industrielle !)
On continue notre route sur des chemins de terre qui nous poussent même à porter les vélos sur une courte portion. Le temps est lourd, l’orage approche. Pour échapper à la pluie qui a fini par nous rattraper, on s’abrite sur le parking couvert de tôles d’un centre de tri, c’est parfait.
Hajduk Split. Même si on avait voulu, on n’aurait pas pu ignorer l’existence des Hajduk Split. (L’un des plus grands clubs de foot de la Croatie) On a croisé des centaines de peintures aux couleurs du club. Depuis notre entrée en Croatie jusque plusieurs kilomètres dans les pays voisins. Partout: route, arrêts de bus, façades, murs, trottoirs, compteurs électrique, bars… ! Tout ce qui peut être peint est recouvert du blason. Dans chaque voiture trône d’ailleurs un fanion sur le rétroviseur central. Les Hajduk Split, c’est une véritable religion !
Ploče. Le trafic est supportable aujourd’hui sur la côte. On mange à un arrêt de bus au milieu de nulle part (en vrai, pas tant, ça reste la côte !), pas sexy mais luxueusement ombragé ! On est KO, ça fait plusieurs jours qu’on tire sur nos nouveaux muscles pour avancer à toute berzingue vers la Bosnie. Ce soir on dort vers Ploče. À priori, sur la pointe, il y a une école de Kite surf où le camping est toléré. On croise un cycliste du coin, qui nous met vivement en garde sur la route : visiblement, on n’est pas les seules à trouver la conduite locale intense ! On arrive sur la pointe, le vent dense dans la face ! (C’est vrai que pour un spot de kite surf, ça fait sens, maintenant qu’on y réfléchit !) On y trouve un ancien camping abandonné aux sanitaires littéralement saccagés, à côté une maison dans le même état. Dans le coin de chaque pièce, des cacas humains et des boites de pâté pour chat. Joyeux mélange. Malgré un très beau carton aménagé en sofa pour félin, on se dit qu’on peut trouver mieux pour dormir. Une petite chapelle nous a finalement offert un bien meilleur spot à l’abri du vent (après un petit nettoyage des papiers, clopes, capotes, bouteilles, vêtements, lingettes… nécéssaire). L’humain est sale !
Juste avant la frontière. On s’arrête dans le café avec vue sur le poste de frontière (ça commence à devenir une tradition) et GG entame la lecture assidue du journal (en croate). Après quelques minutes elle finit par tomber sur un article -avec la photo de plusieurs tentes- qui semble nous concerner : « ilegalni kamperi ». Interrogée elle décide de traduire ce qui semble être « Nous sommes seulement en mai, et les bivouacs ont déjà commencé malgré les interdictions et les amendes ». Oups ! ça tombe bien, on quitte la côte et la Croatie.
Direction la Bosnie-Herzégovine pour de nouvelles aventures à vélos !